Evolution des critères de sélection des donneurs de sang : décryptage de Syria Laperche

Portrait-Syria Laperche

Nous sommes à quelques jours de l’entrée en vigueur de l’arrêté portant sur la modification de certains critères de sélection des donneurs de sang. Syria Laperche, directrice médicale, décrypte les enjeux autour de ces évolutions et nous donne son éclairage.

Au 1er septembre, certains critères de sélection des donneurs de sang évoluent, pouvez-vous rappeler lesquels ?

« En effet, à partir du 1er septembre, la durée d'ajournement des donneurs concernant le tatouage, le piercing (boucles d'oreilles incluses), l’acupuncture, la sclérose de varices, la mésothérapie et l’endoscopie avec instrument flexible sera réduite de 4 à 2 mois. 

Par ailleurs il n’y aura plus d'ajournement des donneurs en cas d'utilisation de substituts osseux en implantologie dentaire.

Enfin, les dispositions relatives aux donneurs porteurs d'hémochromatose génétique vont évoluer. Ils pourront se rendre aussi bien en maison du don qu’en collecte mobile dès leur premier don-saignée sans recourir à 5 saignées préalables dans un centre de soins. Une prescription médicale sera toutefois toujours nécessaire. »

 

Pour quelles raisons ces critères ont-ils évolué ? 

 

« Concernant les tatouages et toutes les pratiques qui pourraient exposer à un agent infectieux transmissible par le sang, tel que le virus de l’hépatite C par exemple, de nombreux progrès ont été réalisés permettant ainsi de faire évoluer les critères. Tout d’abord, les conditions d’hygiène dans les établissements de tatouage ou de piercing se sont nettement améliorées. Enfin et surtout, les progrès techniques permettent de proposer aujourd’hui des outils de diagnostic plus performants, comme ceux utilisés pour le dépistage génomique viral (DGV). 

 

En effet, en détectant directement le virus dans le sang cette méthode permet la mise en évidence de l’infection de manière beaucoup plus précoce que la détection des anticorps sur lesquels le dépistage était historiquement basé. C’est ainsi que la fenêtre biologique silencieuse s’en trouve réduite*. »

Y a-t-il des travaux en cours pour revoir d’autres critères de sélection ?

 

« Les travaux sur l’évolution des critères de donneurs de sang sont permanents. En fonction des avancées technologiques et des connaissances scientifiques et épidémiologiques, les conditions d’accès au don sont régulièrement réévaluées. Elles peuvent être soit assouplies soit restreintes, l’objectif essentiel étant d’assurer un niveau de sécurité maximale que ce soit pour les donneurs ou les patients. 

 

Par exemple, actuellement, une réflexion est menée sur l’âge d’accès au don notamment dans sa limite supérieure ainsi que sur les risques cardiovasculaires. »

 

 

Pouvez-vous nous en dire plus sur les process d’évolution de manière globale ?

 

« Les critères de sélection des donneurs de sang sont revus périodiquement dans le cadre de travaux menés sous l'égide de la Direction générale de la santé (DGS). Ces travaux poursuivent plusieurs objectifs et notamment, celui de garantir la sécurité au plus haut niveau des receveurs de sang comme celle des donneurs. 

 

Lorsqu’il s’agit des critères relevant de la sécurité des patients, les experts du Haut conseil de la Santé publique sont amenés à travailler pour émettre des avis/recommandations de manière à éclairer la décision qui incombe in fine aux autorités sanitaires. 

 

Dans tous les cas, la décision n’appartient pas à l’EFS. Le rôle de l’établissement est d’apporter des éclairages compte tenu de son expertise. »

Quel est le rôle des équipes de QBD de l’EFS dans le processus ? 

 

« Les équipes de la qualification biologique des dons (QBD) jouent un rôle important dans l’évaluation des nouveaux outils de diagnostic avant leur déploiement dans l’environnement qui est le nôtre. Grâce notamment aux échantillons conservés à la « plasmathèque » nationale, elles ont permis d’évaluer les performances des nouvelles techniques et méthodes proposées par les industriels. »

 
 

Qu’est-il prévu pour accompagner ces évolutions auprès des équipes concernées et du grand public ? 

 

« Une communication sera déployée sur les réseaux sociaux, nos sites internet et nos canaux digitaux afin d’accompagner ces changements auprès des donneurs.

Une information a déjà été effectuée aux membres du réseau prélèvement pour diffusion auprès des équipes. Parallèlement, des éléments de langage (EDL) ont également été partagés au personnel de collecte pour répondre aux éventuelles questions des donneurs.

Bien sûr, l’ensemble de nos partenaires et parties prenantes sont également informés de ces évolutions.
 

Et enfin, une sensibilisation du personnel en charge de l’entretien préalable au don (EPD) est prévue pour l’appropriation des évolutions à l’aide d’un diaporama pédagogique produit par la direction médicale. »

 

Pour conclure quel est le bénéfice attendu ?

 

« Grâce à ces évolutions, nous espérons pouvoir donner accès au don à un plus grand nombre de donneurs, notamment dans la population des jeunes qui ont recours assez souvent aujourd’hui à des tatouages. Toutefois, là n’est pas l’objectif principal qui reste avant tout la sécurité des donneurs et des patients. Il s’agit donc de prendre en compte et d’intégrer les évolutions scientifiques, épidémiologiques et technologiques dans nos pratiques.

Ces éléments permettent de donner son sang sereinement et d’améliorer l’expérience donneur au bénéfice des patients. »